Le Mémorial de la Déportation Gleis 17 (Quai 17) commémore le destin de milliers de Juifs allemands à l'époque du national-socialisme. C'est très certainement l'un des espaces commémoratifs les plus poignants et dignes que Berlin offre.
Une visite au Mémorial de la Déportation Gleis 17 est facultative. C'est aussi un coup de cœur personnel.
Le régime hitlérien a conduit à l'extermination physique et morale de la communauté juive de Berlin. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Berlinois de culture ou de confession juive ont été arrêtés et parqués dans des centres de rassemblement avant d'être déportés vers l'Est et la mort.
La gare de Grunewald est devenue le principal lieu de départ des convois vers les camps de concentration, les ghettos des villes de Pologne ou d'Union soviétique occupées par les armées allemandes, et le complexe d'Auschwitz. Plus de 50 000 personnes, hommes, femmes, aînés et enfants, ont emprunté la rampe pour rejoindre les quais.
Cyniquement, l'administration ferroviaire rançonnait les déportés au début. Puis elle a commencé à facturer directement ses services à l'Office central de la Sécurité du Reich. Cette participation active a été redécouverte bien plus tard, conduisant à la création dans les années 1990 d'un ensemble mémoriel multiple. Sur le parvis de la gare, différentes œuvres artistiques, légères ou graves, sont présentées. Le visiteur remonte ensuite la rampe.
Une puissance émotionnelle exceptionnelle
La particularité du Mémorial de la Déportation Gleis 17 est qu'il se trouve dans un cadre bucolique de grandes maisons bourgeoises. L'espace est singulièrement charmant. Cette configuration donne au lieu une puissance émotionnelle exceptionnelle, peut-être égalée par le Musée Juif.
Sur le site original, des deux côtés d'une voie ferrée désaffectée, des plaques métalliques se succèdent. Chacune représente un convoi. Les informations sont réduites à leur strict minimum : la date du départ, le nombre de personnes, le lieu de destination. L'apport académique de connaissances n'a pas lieu d'être car l'objectif est ici de maximiser la portée émotionnelle.
Progressivement, le visiteur prend conscience de l'ampleur de la catastrophe, de la logistique incroyable que demandait le transport de centaines d'individus, du drame humain que seuls ceux et celles qui ne voulaient pas voir n'ont pas vu. L'antisémitisme apparaît comme l'élément moteur : jusqu'aux dernières heures de son existence, le Troisième Reich a fait de la déportation des Juifs une priorité absolue. L'ultime convoi connu a quitté cette gare en mars 1945 avec 18 personnes à son bord, à destination du camp de Theresienstadt, en Bohème-Moravie.
Un lieu de recueillement avant tout
La visite du Mémorial de la Déportation Gleis 17 est une expérience troublante, voire déchirante. La sobriété de la conception, la tranquillité d'un espace excentré des zones touristiques, la nature qui envahit l'endroit indiquent que plus jamais un seul train ne quittera ce quai.
Certains objecteront que l'absence singulière d'informations historiques nuit à une véritable compréhension de l'événement. Ces critiques ne sont pas justifiées. L'ensemble n'a pas l'ambition d'informer ou d'apprendre ce qui s'est passé. Il s'agit de lutter contre le déni et d'offrir à ceux qui le souhaitent un lieu de recueillement. C'est en ces lieux que la communauté juive de Berlin et ses amis commémorent chaque année le drame des pogroms de novembre 1938. Par conséquent, une visite ne s'impose pas car la démarche doit rester personnelle.
Atouts
Présentation digne et sobre
Portée émotionnelle très forte
Authenticité des lieux
Quartier résidentiel paisible
Limites
Temps de visite dépendant des attentes de chacun
Absence de tout interlocuteur sur place
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