Le Centre de réfugiés de Marienfelde (Erinnerungsstätte Notaufnahmelager Marienfelde) à Berlin est à la fois un mémorial et un musée sur la RDA et Berlin-Ouest. Il fait intelligemment référence à la question migratoire actuelle. Malheureusement, il n'est absolument pas mis en valeur.
Une visite au Centre de réfugiés de Marienfelde est facultative
La levée du blocus de Berlin conduit, en 1949, à la constitution de deux États allemands. Les nouvelles frontières suivent les lignes de démarcation des secteurs d'occupation. En RDA, la contestation populaire du printemps 1953 est violemment réprimée par l'Armée rouge. La violence politique s'abat sur les opposants au régime, réels ou supposés.
Nombreux sont ceux qui décident alors de fuir vers l'Ouest. Certes, la frontière inter-allemande entre RFA et RDA était dès cette époque difficilement franchissable. Mais la particularité de la division isolait Berlin-Ouest en territoire est-allemand. En l'absence d'un système frontalier hermétique et performant, la zone occidentale devenait le lieu de passage privilégié pour rejoindre le reste de l'Allemagne de l'Ouest. Le mouvement est massif. En quelques années, plus d'un million d'Allemands de l'Est passent par Berlin-Ouest. Beaucoup rejoignent les lieux de transits pour réfugiés, mis en place par la Croix-Rouge et l’État ouest-allemand.
Le principal centre se trouvait dans le secteur américain à Marienfelde. Aujourd'hui, il accueille encore des réfugiés venus du monde entier. Parallèlement, un des bâtiments est utilisé comme lieu de mémoire. Le centre de documentation présente une exposition portant sur l'exil et le déracinement.
Mettre la question de l'exil en avant
L'espace consacré aux expositions se répartit sur deux étages de l'ancien bâtiment administratif du Centre de réfugiés de Marienfelde. Au rez-de-chaussée, trois salles se succèdent le long d'un couloir. Sur les murs, une chronologie succincte présente les grands événements de la division allemande. Les expositions évoquent les raisons de l'exil et les diverses méthodes utilisées pour quitter la RDA. La muséographie est épurée et l'espace relativement restreint, ce qui renforce ainsi l'aspect presque intimiste de l'exposition.
Des notices biographiques informent des différents itinéraires de vie à l'aide d'objets du quotidien, depuis une paire de chaussures jusqu'à la poupée d'une fillette. L'ensemble est profondément humain. La troisième salle retrace les épreuves administratives que le réfugié devait surmonter. Ce parcours éreintant devait donner le droit de travailler en Allemagne de l'Ouest et d'obtenir toute la protection sociale nécessaire pour commencer une nouvelle vie.
À l'étage, l'organisation de l'accueil à proprement parler est abordée. On y évoque le menu des repas, les histoires humaines bouleversées et reconstruites. Une exposition photographique montre la vie quotidienne depuis 1953 jusqu'à aujourd'hui. Les photos en noir et blanc laissent progressivement place à celles en couleurs. Des familles est-allemandes sont remplacées par d'autres venues de Syrie, de Bosnie ou d'ancienne Union soviétique. Finalement, le visiteur traverse des chambres à coucher d'époque. Sur les murs, les citations des réfugiés d'hier et d'aujourd'hui reflètent les mêmes appréhensions et sentiments. On y lit la promesse d'un nouveau départ et la peur du renouveau.
Quand la question historique se trouve actualisée
Le Centre de réfugiés de Marienfelde questionne intelligemment les raisons qui poussent des hommes et des femmes à partir sur les routes de l'exil. Les craintes et les peurs des réfugiés d'antan et d'aujourd'hui ne sont pas si différentes. En réalité, les aspirations à une vie ordinaire sont d'une époque à une autre finalement assez similaires.
Le mémorial actualise le fait historique. Il inscrit l'histoire de la division allemande dans le cadre plus large de la politique d'accueil de l'Allemagne depuis 2015. Pourtant, l'ensemble présente également des limites. On regrette le manque d'exhaustivité et une présentation au final assez générale. Cela trahirait un manque d'ambition. Par extension, on devine l'absence d'une volonté politique à faire de ce lieu un véritable musée de l'exil.
Atouts
Dimension humaine de l'exposition
Espace scindé entre travail de mémoire et accueil des réfugiés
Question de l'exil enfin abordée et actualisée
Limites
Absence d'informations en français
Muséographie parfois illisible car surchargée
Lieu de mémoire s’effaçant progressivement
Surface d'exposition assez limitée
Pour aller plus loin
Une mobilisation académique en faveur d'un authentique musée de l'exil.
Les notions d'exil et d'errance pour comprendre le monde contemporain.
Des cours d'intégration et de citoyenneté pour les migrants en Allemagne.
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